J’avais oublié. Volontairement c’est sur. J’avais oublié. Tous ces petits détails qui font du quotidien à Maputo un dépaysement de chaque instant.
La langue d’abord.
Ou devrais je dire les langues. Mais surtout au portugais auquel je pense. Cette langue maternelle que je maîtrisait si mal avant de vivre ici, et que j’ai réussi à améliorer au fil du temps, en l’enrichissant de toutes les onomatopées si caractéristiques du parler mozambicain. On y trouve le xiiiiiii ?! suivi d’un point d’interrogation ou d’exclamation, c’est selon. On pourrait le traduire par ouaaaaah ou énorme. Et que dire du tss-tss, cette abréviation du com licença qui a du prendre quelques décennies avant d’être réduit au simple tss-tss. On l’emploie pour appeler quelqu’un ou attirer son attention, ou tout simplement dans un hypermarché, lorsqu’on demande à la personne a qui on s’adresse de nous laisser passer. Le aannnhh, marque le désaccord, et si je vous mmhhh, j’abonde dans votre sens. Le heiiiii lui, si vous l’entendez un jour, signifie un refus catégorique, avec une touche de « comment as-tu pu penser cela, ou demander cela ». Il y en d’autres, mais ceux là sont les plus utilisés. Le Petit Futé devrait y faire référence dans son guide, car s’il existe plus de 20 parlers du Nord au Sud du Mozambique, ces sonorités sont elles, tout particulièrement universelles dans ce pays.
Outre les onomatopées, le portugais est chanté ici. Sur un rythme langoureux, les consonnes sont arrondies, adoucies, contribuant à donner un air très sympathique à votre interlocuteur. On pourrait dire que le portugais a subi ce qu’on réserve aux fruits qui entrent dans la préparation du smoothie. Le portugais ici, c’est un smoothie de chaque instant, rafraîchissant, vitaminé, ensoleillé. De quoi donner la pêche et la banane à chaque instant.
Les sourires ensuite
Certains disent que ce sont les effets de 20 ans de guerre. De libération d’abord, et intestine ensuite. Je veux bien le croire. Après 20 ans d’horreurs, de malheurs, on peut comprendre que le peuple mozambicain soit aussi souriant, gentil et accueillant. Tous les jours j’en témoigne. Les gens sont d’une accessibilité ici, quel que soit leur niveau social. Toujours prêts pour un brin de discussion, en tout lieu et à toute heure. Taper la discut’ dans la queue de l’hyper, au guichet de la banque, avecle serveur. Des échanges simples qu’on a une certaine tendance à éviter en RP. Et Dieu que ça fait du bien de pouvoir prendre le temps. Les mozambicains en ont fait un art de vivre. Pour travailler avec eux, il faut l’avoir intégré.
Et le sourire, God, le sourire. Je suis tous les jours sur le cul de voir autant de sourires sur les visages d’une population si pauvre, si oubliée sur l’échiquier international, si écartée des richesses nationales. De la grand-mère qui fait la manche au feu près de mon bureau, aux jeunes ados qui déjà, à 12/13 ans passent leurs journées à collecter sur les routes le sable chahuté par les averses tropicales pour en faire des parpaings, au coiffeur de rue, aux tisseurs de palmes qui habillent des sturctures de fer forgé qui deviendront des meubles, aux fillettes qui transportent des litres et des litres d’eau sur leur cou tout frêle, toujours, toujours ce sourire éclatant. Je me demande si, au bout du compte, ils ne sont pas plus heureux que moi, que la plupart d’entre nous.
Dieu que j’aime ces gens.
L’Océan Indien enfin
Scruter l’horizon. Voilà un plaisir que nous citadins, avons très peu souvent l’occasion de savourer. Et pourtant, les sentiments d’espace, de grandeur, de liberté même (inconsciemment surement) que regarder l’Océan Indien me procure m’ont amené à changer mon itinéraire quotidien pour aller au boulot. C’est la Marginal que j’emprunte désormais. Cette avenue de 15km ceinture Maputo et se love sur tout le littoral. L’avenue est belle, ses cocotiers marginalement alignés apportent la un air de vacance tout à fait à propos avant de démarrer la journée. Clara aussi adore ce petit circuit matinal qui contribue à notre qualité de vie ici. Voir au loin les dhows sur la baie de Maputo et se rappeler qu’on mangerait bien des crevettes grillées pour déjeuner, apercevoir des prêtres autoproclamés baptiser leurs ouailles dans les eaux de la baie, se faire tss-tsser par des gamins vendant du barracuda, des noix de cajou, c’est selon. Il est 7h30, le soleil est déjà haut sur les bleus de la Baie, et je pars travailler.
dimanche 9 mai 2010
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